« il faut lâcher prise » « lâche prise ! » peut-on s’entendre dire.
Plus facile à dire qu’à faire ! La tâche n’est pas aisée, et lâcher prise ne se décrète pas et fait partie d’un processus. Et la compréhension de ce qu’est le lâcher-prise, de ce qui s’y joue dans la prise et le lâcher-prise va permettre d’entamer le processus du lâcher-prise.
Pas de prétention ici de donner un « prêt à l’emploi » avec 100% de garantie mais de vous donner des pistes, et éléments d’éclairage pour vous aider à faire votre chemin vers le lâcher prise
#1 Qu’est-ce que le lâcher-prise ?
Le sujet est presque flou, ne sachant finalement pas ce que cela recouvre : qu’avons-nous à lâcher ou juste ? Quelle est cette prise qu’il nous faudrait lâcher ? à quoi tenons-nous ?
Dans notre quotidien, nous sommes soumis à un niveau de stress, nous nous mettons la pression, au travail, en famille. Et puis, il y a ce sujet sur lequel nous nous agrippons, celui qu’on ne lâche pas, dans le couple, au travail, en famille, un événement, une situation qui nous préoccupe.
Quand on demande à une personne ce qu’il se passe dans « ce sujet qu’on tient », comment ça se manifeste : la réponse apportée est souvent relative aux pensées, aux ruminations. La problématique tourne non-stop dans notre esprit, plus ou moins en avant-plan ou arrière-plan, revenant à notre esprit, quand on essaie de s’endormir, quand on travaille. On n’arrive plus à penser à autre chose.
Prenons quelques exemples dans différents domaines pour approcher le sujet :
- Au travail: vous n’aimez pas votre travail, mais vous vous dites que vous pouvez tenir, vous accrocher, et que le management vous donnera bientôt une promotion pour un autre travail. Vous serez ainsi débarrassée de vos missions actuelles que vous n’aimez pas.
- Dans le couple: vous avez rencontré un homme/une femme malheureusement celui-ci n’est pas disponible, il/elle est déjà en couple. Après quelques soirées passées ensemble, il/elle ne montre aucun signe d’envie/de disponibilité de vous voir. Mais vous vous dites qu’il/elle est occupé(e) avec son travail, et puis avec son/sa compagnon/compagne, que la situation n’est pas simple pour lui/elle. Vous lui trouvez des excuses.
- Au travail: vous êtes en cours de négociation avec votre employeur, vous êtes en arrêt maladie et vous passez votre temps à attendre la réponse de celui-ci, durant ces mois de négociation.
- Dans le couple: votre compagnon/compagne est alcoolique, vous vous dites qu’il/elle arrêtera de boire si vous êtes gentil(le) et que vous ne la « forcez » pas à arrêter de boire.
- A la maison: vous aimez que tout soit rangé, nickel, le ménage doit être fait chaque jour
- Examens : vous avez un examen dans quelques semaines, vous passez vos journées, vos soirées, vos week-ends à travailler sans relâche. Vous ne prenez aucune pause, vous vous acharnez sur vos révisions et vous n’avez qu’une idée en tête : réussir. Même si plus rien ne rentre, si vous commencez à tout mélanger, vous continuez à réviser.
Dans ces exemples, apparaissent différentes notions :
- Le principe du contrôle: la prise que nous tenons est la situation, l’événement, la personne. Tenir cette prise est une façon pour nous de tenter de contrôler la situation. C’est comme si, en tenant prise, nous avions l’illusion de contrôler la situation, de contrôler l’autre.
- Le mental: ces pensées ruminatives nous permettent aussi de masquer les émotions sous-jacentes, en nous divertissant vers le mental.
- La projection dans le futur: dans cette prise, nous sommes embarqués dans l’avenir et décollés du présent.
- Le révélateur d’un manque, de besoin : en filigrane, dans les exemples, nous pouvons percevoir que le fait de tenir face à un manque ou de combler un besoin. Je vais revenir sur ce point un peu plus loin dans cet article.
- La distorsion de la réalité: nous sommes non seulement décollés du présent mais aussi de la réalité, en faisant des petits arrangements avec la réalité, en se berçant d’illusions. Et en nous accrochant à des situations pourtant mauvaises pour notre bien-être. Nous négocions avec nous-mêmes sans voir la réalité, certes pour de « bonnes raisons » ou plutôt des attentes que nous avons.
Et justement, la prise de conscience va être le point de départ du processus de lâcher prise.
Mais avant cela, j’aimerais « remonter d’un cran », en apportant une perspective plus large sur le sujet, qui, certes, ne va pas forcément apporter des « billes » de façon pragmatique (et quoique) mais va compléter notre éclairage.
#2 l’ego et la séparation
A un niveau plus large, ce qui se joue dans la prise a à voir avec notre ego
- Comme l’explique bien Gilles Farcet, écrivain, dans la mouvance spirituelle d’Arnaud Desjardins, moi, vous, nous existons chacun, indépendamment du tout, séparé, seul, et seul face à l’autre. Tout ce qui n’est pas moi est autre. Et l’autre ne m’obéit pas toujours. Identifié au moi, je vis à la fois dans cette grande peur et dans cette illusion de toute puissance.
- Au lieu de nourrir cet ego, l’idée serait plutôt de cultiver notre appartenance et ce lien au tout, d’accepter finalement l’autre dans sa différence et son individualité, sans chercher de le « ranger » à ses normes ou critères. Finalement accepter l’autre en tant qu’autre
#3 le processus du lâcher-prise
Nous l’avons dit, lâcher-prise ne se décrète pas, d’un mot, d’un seul mais est le fruit d’un processus avec différentes étapes que nous allons voir ici
- Phase de prise de conscience: au départ, nous sommes collés à la situation, à l’événement, pris dans nos pensées, dans notre souffrance et même confondus dans cette souffrance. La 1ère étape va être de reconnaître ce qui est là.
- Avant de prendre de la distance avec ce qui nous fait souffrir, l’invitation est de reconnaitre la réalité de notre souffrance et reconnaître aussi la réalité de la situation.
- Reconnaître la réalité de notre souffrance c’est pouvoir exprimer ce qui fait souffrir : petit à petit identifier la cause, la source de la souffrance, celle qui est en surface et dénouer le fil jusqu’à nos besoins qui sont en jeu. C’est pouvoir aussi traverser en conscience la souffrance et les émotions qui sont liées.
- Reconnaitre la réalité de la situation: c’est démasquer les illusions, les projections, les petits arrangements avec notre conscience. C’est pouvoir faire le tri entre les illusions et le réel.
Cette étape est délicate : un accompagnement est parfois nécessaire dans ce processus, ne serait-ce que le regard bienveillant mais « objectif » d’un ami peut vous y aider.
Cette prise de conscience va petit à petit nous permettre de décoller de la situation, de petit à petit desserrer notre prise par rapport à la situation, la personne…
- Phase d’acceptation, de renonciation :
La phase d’acceptation, de renonciation est en quelque sorte une phase de prise en compte de la réalité telle qu’elle est. Accepter ne signifie pas se résigner, c’est à la fois la capacité de regarder la réalité en face, et une remise à plat de ce que vous pouvez faire et de ce qui n’est pas de votre ressort.
- Renoncer à contrôler l’avenir et revenir dans le présent : la citation de John Lennon est fort à propos ici : « la vie, c’est ce qui vous arrive pendant que vous êtes en train de faire d’autres projets »
- Accepter ses propres limites
- Accepter qu’on ne peut pas contrôler l’autre
- Accepter parfois que, pour le moment, ce n’est pas possible pour soi d’accepter et que nous avons besoin de temps pour vivre la situation, vous connecter à vos manques, vos besoins, le temps de traverser ses émotions, avant de passer à autre chose. Est-ce que c’est le bon moment pour vous pour lâcher ? avez-vous vraiment envie de passer à autre chose ?
- Phase de prise de responsabilité
Après avoir regardé la réalité telle qu’elle, nous pouvons alors reprendre notre part de responsabilité dans la situation : une façon d’aborder la situation, l’événement… sous un autre angle et de redevenir acteur par rapport à la situation
- Même si cela peut être difficile à entendre quand nous sommes pris dans la situation, nous sommes partie prenante de la situation, et pas seulement victime de la situation.
- Prendre notre responsabilité, c’est regarder de plus près quelles ont été les attentes dans la situation, l’événement ? quels sont les besoins qui sont en jeu ? (amour, reconnaissance, sécurité… etc) Qu’attendons-nous de l’autre ? de la situation ? dans notre travail, dans le couple ? Qu’avons-nous projeté dans la situation ?
- (re)prendre la responsabilité de nos besoins: comprendre que ces attentes correspondant à vos besoins sont peut-être collées à la situation et s’interroger sur les autres possibilités que vous avez de répondre à ces besoins
- Phase de choix : d’action ou de non-agir
- Agir et faire un choix par rapport à la situation: peut-être de se positionner par rapport à une situation, d’effectuer un acte réel ou symbolique pour passer à l’action ou terminer la situation, porter un autre regard sur la situation et envisager les autres possibilités par rapport à la situation. Les actes réels ou symboliques peuvent matérialiser la séparation, la fin, ou l’évolution de la situation : une lettre qu’on écrit à l’autre, une lettre qu’on écrit et qu’on brûle pour poser des mots à l’autre…
- Agir donc pour répondre à nos besoins, autrement
#4 les outils du lâcher-prise
La sophrologie et la méditation peuvent vous aider dans le processus du lâcher-prise pour :
- Relâcher le corps : La relaxation, l’expérience physique du relâchement du corps en préambule pour relâcher la prise qu’on tient
- Libérer les mots, vous exprimer, non pas dans un boucle de pensées qui tournent sur elle-même. Il s’agit de revenir dans la réalité et aussi de comprendre ce qui se joue pour vous dans la situation. Ecrire peut être intéressant. S’exprimer auprès d’un ami aussi. Ou d’un professionnel
- Accueillir et traverser les émotions avec l’aide de la méditation par exemple
- Revenir dans l’instant présent, et couper court aux ruminations du mental
- Vous connecter à un monde plus vaste
- Vous ressourcer et prendre du recul
- Vous projeter positivement dans le lâcher prise de cette situation et s’ouvrir à d’autres possibilités
Par Hélène Dujardin, sophrologue, praticienne en méditation de Pleine Conscience
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