Incestes, viols, attouchements et agressions sexuelles : quelles différences ? que dit la loi ?
6,7 millions de français sont victimes d’inceste selon une enquête Ipsos datée de novembre 2020. Soit 10% des français. Un chiffre vertigineux qui donne le tournis… L’inceste est un crime d’une violence inouïe, largement commis, mais qui reste tabou, tu, verrouillé par le secret. L’acte est souvent vécu par la victime dans la solitude, constituant le traumatisme.
Dans l’expérience de l’inceste, les contours sont flous, les repères sont brouillés. Et la victime peine à savoir ce qui est « juste ou pas ». Autrement dit, suis-je réellement une victime ?
C’est pourquoi j’ai choisi d’écrire ce premier article pour éclaircir, nommer, clarifier les termes, comme un premier point de repères à transmettre. Cet article est le premier d’une série sur l’inceste, le viol, un traumatisme qui me touche et me tient à cœur. En tant que thérapeute, sophrologue, hypnothérapeute, je reçois régulièrement des femmes et également des hommes, victimes d’incestes et agressions sexuelles.
Abus, viols, incestes, attouchements et agressions sexuelles : quelles sont les différences ?
Source : code pénal
- Un abus sexuel désigne toute contrainte ou tout contact physique, par lequel une personne se sert d'un(e) enfant (toute personne âgée de moins de 18 ans), en vue d'une stimulation sexuelle, la sienne ou celle d'une tierce personne. Les contraintes peuvent être :
- Verbale: il s’agit d’une sollicitation sexuelle, sous forme de séduction subtile (exemple: « je suis frigorifié mais j’ai le cœur et le corps chauds ! ») ou d’insinuation (« te frotter à quelqu’un te ferait du bien »).
- Visuelle: cette contrainte peut prendre différentes formes, utiliser du matériel pornographiques, des images, vidéos ; cela peut être un regard insistant sur certaines parties du corps, le fait de se dévêtir, se montrer nu(e), pratiquer l’acte sexuel à la vue de quelqu’un.
- Psychologique: cette contrainte marque le dépassement de frontière.
- D'une part, entre le relationnel et le sexuel (intérêt excessif pour la sexualité de son enfant) ;
- D'autre part, entre le physique et le sexuel (lavements répétés, intérêt trop marqué pour le développement physique d’un(e) adolescent(e)).
- Contact physique qui se manifeste à différents degrés : des baisers, des attouchements du corps à travers les vêtements, par la force ou non, avec ou sans pression (psychologique ou affective) ; puis attouchement ou pénétration à l’aide d’une main ou d’un objet, contact génital ; simulation de rapports sexuels (avec des poupées, en gardant ses vêtements…), mais aussi viol génital, anal ou oral, obtenu de quelque manière que ce soit, par la force ou non.
Le viol, l’inceste, l’agression sexuelle mais aussi l’exhibition sexuelle sont des abus sexuels.
- Le viol: Il est caractérisé par tout acte de pénétration sexuelle (buccale, vaginale ou anale par la main, le sexe ou un objet) par violence, contrainte, menace ou surprise. Le viol est considéré comme un crime.
- L’agression sexuelle : il s’agit aussi d’une atteinte sexuelle mais se distingue du viol par le fait qu’il n’y a pas de pénétration. elle peut prendre la forme d’attouchements, de caresses sur le sexe, les seins, les fesses ou les cuisses, mais aussi de baisers forcés, etc.
- L’inceste: Les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis sur la personne d’un(e) mineur(e) par un(e) ascendant(e), un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce. Et également le/la conjoint(e), le/la concubin(e) d’une des personnes mentionnées précédemment.
- L’exhibition sexuelle: C’est le fait d’imposer à la vue d’un(e) enfant des actes sexuels dans un lieu accessible au regard du public, ou dans un cadre privé.
Ce qui dit la loi…
Début 2021, Camille Kouchner publiait « la familia grande », livre qui révélait l’inceste au sein d’une famille puissante : Camille Kouchner est la fille de l’ancien ministre Bernard Kouchner et de la professeur de droit Evelyne Pisier. Elle dévoilait dans ce livre l’inceste commis sur son frère jumeau par son beau-père, l’homme politique, Olivier Duhamel, puissant et médiatisé.
- Cela a créé une onde de choc, Olivier Duhamel a démissionné de ses fonctions et reconnu les faits devant les policiers, même si le parquet a classé l’affaire sans suite pour prescription.
- A la suite de ça, des témoignages sont apparues sur les réseaux sociaux sous le hashtag #MeTooInceste. Une commission indépendante a été lancée pour orienter l’action publique contre ce fléau, avec un impact et des avancées sur l’aspect législatif (loi d’avril 2021).
Alors, qu’est ce qui est prévu par la loi ? comment ce crime est-il puni ? qu’est-ce que la loi d’avril 2021 a apporté ?
- Le viol est considéré comme un crime alors que les agressions sexuelles autres que le viol sont des délits
- Crime et délit sont deux des trois classifications d’infractions. La principale différence se trouve au niveau de la gravité de l'acte et de la sanction ainsi que le délai de prescription. le délit est l'infraction intermédiaire et le crime est l'infraction la plus grave.
- Les facteurs qui vont distinguer les peines et amendes encourues ainsi que les délais de prescriptions sont :
- L’âge de la victime au moment des faits : moins de 15 ans, mineure ou victime majeure.
- La date à laquelle les faits ont été commis, avant ou après le 23 avril 2021 . En effet, à cette date, de nouvelles lois concernant la preuve ainsi que la révision du délai de prescription sont passées.
- Des circonstances aggravantes comme celles de l’inceste.
- En ce qui concerne le viol :
- Pour les victimes de moins de 15 ans, pour les faits commis après l’entrée en vigueur de la loi du 21 avril 2021 (soit le 23 avril 2021), la victime doit démontrer la relation sexuelle pour caractériser le viol, sans avoir à prouver la surprise, menace ou violence. Avant cette date, elle doit en démontrer l’usage.
- La peine encourue : 20 ans emprisonnement.
- Les victimes ont jusqu’à 30 ans après leur majorité soit leurs 48 ans pour porter plainte.
- Pour les victimes de plus de 15 ans et majeures, elles doivent démontrer l’usage de la contrainte, menace, surprise ou violence
- La peine : 15 ans de prison (20 ans si inceste)
- La victime majeure a 10 ans pour porter plainte, celle mineure a jusqu’à ses 48 ans
- L’inceste est une circonstance aggravante.
- Le viol sera puni de 20 ans emprisonnement et 7 ans pour l’agression sexuelle
Pour les agressions sexuelles autres que le viol.
- Pour les victimes de moins de 15 ans, avant la loi du 21 avril, il suffit de démontrer l’acte à caractère sexuel (l’auteur doit être âgé d’au moins 5 ans en plus par rapport à la victime), et avant la loi, comme pour le viol, il faut démontrer l’usage de la contrainte…
- La peine encourue : 10 ans de prison, 150 000€ amende.
- La victime a 20 ans à compter de sa majorité pour porter plainte, soit 38 ans.
- Pour les victimes de plus de 15 ans, et les victimes majeures doivent démontrer l’usage de la contrainte
- La peine : 5 ans de prison et 75 000€ amende (7 ans et 100 000€ amende si inceste)
- La victime majeure a 6 ans pour porter plainte, celle âgée entre 15 et 18 ans, 10 ans à compter de sa majorité (20 ans si inceste)
Les aspects de droit posent différentes questions et comprennent des difficultés en lien avec :
- les notions de consentement, même si la loi du 21 avril 2021 a permis d’avancer sur le sujet
- le délai de prescription (nous aborderons la question de la mémoire traumatique dans un autre article)
Et ceci est d'autant plus vrai qu'il y a un phénomène de honte autour de l'inceste. De la pression et du rejet sont ressentis par la victime.
Les mots, notions sont spécifiés ; les contours législatifs également. Voilà qui, je l’espère, donne un premier point de repère par rapport aux questions du viol, des agressions sexuelles, de l’inceste.
Dans un second article, j’aimerais transmettre les repères et une compréhension de ce qui se passe lors du traumatisme. Vous trouverez également d'autres articles sur le sujet sur les symptômes, les ressentis, la reconstruction après le traumatisme, des conseils pour les proches et amis de victimes
Sophrologue, hypnothérapeute, thérapeute, je peux vous accompagner si vous avez été victime d’une agression, d’un viol, d’un inceste. Vous pouvez m’appeler pour un premier contact et si vous le souhaitez prendre rendez-vous. Consultations à Paris dans le 11ème et en visio
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